Épandage phytosanitaire, traitement chimique de cultures, Vienne
© Michel Bramard / Office français de la biodiversité
Les substances polluantes des milieux aquatiques
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Les nitrates et les phosphates
Pour leur croissance, les plantes ont besoin d’éléments nutritifs (ou « nutriments ») plus ou moins abondants dans la nature, parmi lesquels l’azote et le phosphore. Dans la majorité des cas, c’est surtout la disponibilité de ces deux éléments qui limite le développement végétal : l’azote provient essentiellement du cycle de transformation des nitrates, des nitrites et de l’ammoniac, alors que le phosphore provient essentiellement des phosphates. Les plantes assimilent ces nutriments en grande partie par leur système racinaire.
La quantité de nitrates naturellement présents dans les milieux aquatiques est relativement faible, mais des quantités importantes sont rejetées par les activités humaines. En effet, pour augmenter artificiellement la disponibilité en azote dans le sol, des engrais azotés et des effluents d’élevage sont souvent épandus sur les cultures. Lors des pluies, une partie des nitrates qu’ils contiennent rejoint les rivières par ruissellement ou les nappes par infiltration, entraînant une augmentation de la concentration.
Le cycle de l'azote
© Office français de la biodiversité / Réalisation Matthieu Nivesse (d'après OIEau), 2018 - LO-OL
Les phosphates sont aussi contenus dans les engrais utilisés en agriculture, et peuvent être entraînés par les pluies de la même manière. Ils sont en outre rejetés en grandes quantités par les activités domestiques et industrielles, par l’intermédiaire des rejets d’assainissement.
Le cycle du phosphore
© Office français de la biodiversité / Réalisation Matthieu Nivesse (d'après OIEau), 2018 - LO-OL
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Épandage d'engrais sur un champ de blé, bassin versant Magnerolles, Deux Sèvres
© Michel Bramard, Office français de la biodiversité
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Rejet des eaux de lavage, station AEP, Laval
© Olivier Leroyer / Office français de la biodiversité
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Rejets d'effluents par un émissaire sous-marin
© Aurélia Chery / Office français de la biodiversité
En France, en 2021, 712 installations ont rejeté des substances dans les milieux aquatiques. Nota bene : les installations concernées sont les installations classées soumises au régime de l'autorisation ou de l'enregistrement (Titre 1er du livre V du Code de l'environnement) ainsi que celles visées par le règlement européen E-PRTR n°166/2006 du 18 janvier 2006 concernant la création d'un registre européen des rejets et des transferts de polluants.
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Les matières organiques
Les matières organiques proviennent de la décomposition des matières vivantes. Elles sont présentes naturellement dans les milieux : les déjections animales, les animaux morts ou les fragments de végétaux se décomposent et se transforment en matière organique. Elles proviennent aussi des eaux usées et des effluents agricoles et industriels, qui charrient également de la matière vivante en décomposition. La quantité de matière organique dans les eaux épurées dépend notamment de l’efficacité des traitements d’épuration.
Une fois arrivées dans les milieux aquatiques, les matières organiques subissent une dégradation biologique par les micro-organismes - un phénomène très consommateur en oxygène. Une quantité trop importante de matières organiques dans un milieu peut donc conduire à une baisse importante de la quantité d’oxygène dissous dans l’eau (en savoir plus sur les impacts du manque d’oxygène).
En outre, certaines substances issues de cette dégradation contiennent des nutriments, comme par exemple l’ammoniac (appelé ammonium lorsqu’il est dissous), et augmentent les risques d’eutrophisation (en savoir plus sur l’eutrophisation).
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Les micropolluants
Les micropolluants sont des substances susceptibles d’avoir un impact sur la santé ou l’environnement - seuls ou combinés à d’autres micropolluants - même à des concentrations très faibles. Ce sont des substances qui ne sont pas naturellement présentes dans les milieux, mais proviennent des activités humaines. Les micropolluants incluent en particulier :
- les pesticides et biocides utilisés pour l’agriculture, l’entretien des espaces verts ou le jardinage, ainsi que les autres substances biocides utilisées pour d’autres usages (par exemple dans les peintures des bateaux, pour éviter que des organismes comme des algues ne s’y développent) ;
- les médicaments et les résidus médicamenteux, qui ne sont pas éliminés par le traitement des stations d’épuration, et se retrouvent dans les milieux ;
- diverses substances issues d’usages industriels ou domestiques : détergents (alkylphénols), plastifiants (phtalates, bisphénol), retardateurs de flamme (polybromodiphényléthers - PBDE), isolants électriques (polychlorobiphényles - PCB), produits de combustion (hydrocarbures aromatiques polycycliques - HAP, dioxines, furanes), matières plastiques, colles, additifs pour carburant, antibactériens (aldéhydes, anilines, benzènes, cétones, perfluorocarbures - PFC), phénols)…
Certaines de ces substances ont la caractéristique d’être très peu biodégradables : elles persistent donc dans l’environnement longtemps après l’arrêt de leur utilisation. Elles peuvent aussi se concentrer dans les tissus vivants, provoquant une contamination de la chaîne alimentaire. C’est par exemple le cas des PCBs, interdits en 1987 suite à la découverte de leur caractère toxique (Legifrance), mais encore présents dans l’environnement.
Les micropolluants ont des effets toxiques à différentes échelles sur les êtres vivants (en savoir plus sur la toxicité), et peuvent agir comme des perturbateurs endocriniens, c’est à dire provoquer des perturbations des systèmes hormonaux (en savoir plus sur les perturbations endocriniennes).
Les données de qualité des eaux de surface continentales (cours d’eau et plans d’eau) sont accessibles sur le site Naïades.
Consultez les paramètres physiques, les concentrations de substances chimiques, les inventaires d'espèces et l'hydromorphologie sur environ 5 000 stations de mesure.
Les données relatives aux eaux souterraines sont accessibles sur le site Ades. Consultez le niveau des nappes et les concentrations de substances sur plus de 4 000 stations de mesure.
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Les éléments traces métalliques
Les métaux sont naturellement présents dans l’eau, mais pour la plupart en quantités infimes. Cette concentration naturelle est qualifiée de fond géochimique, parce que ces métaux proviennent du sol et des roches. C’est par exemple le cas de l’aluminium, qui est l’un des composants des roches de la croûte terrestre.
Utilisés pour de nombreux usages, leur présence dans les milieux est généralement d’origine humaine. Ils proviennent notamment des rejets des activités industrielles les utilisant directement, à commencer par la métallurgie. Certains métaux sont aussi directement épandus dans l’environnement, comme le cuivre contenu dans la bouillie bordelaise, qui permet d’éliminer les champignons. L’émission atmosphérique lors de l’incinération de déchets, le ruissellement de l’eau sur les toitures, sont d’autres sources de diffusion des métaux.
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Pollution : rejet d'usine
© Éric Sabot / Office français de la biodiversité
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Pollution : jus d'ensilage
© Claire Broquet / Office français de la biodiversité
Les métaux n’étant pas biodégradables, leur accumulation dans les milieux a des conséquences sur les organismes vivants. Ils peuvent avoir des effets toxiques à plus ou moins long terme, pour certains d’entre-eux même à très faible concentration (en savoir plus sur la toxicité). Certains métaux s’accumulent en outre dans les sédiments, entraînant une pollution durable du milieu. Ils peuvent aussi se concentrer dans les tissus vivants, provoquant une contamination de la chaîne alimentaire.
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Les déchets
Les activités humaines génèrent un grand nombre de déchets, de nature et de composition variées. Emportés par l’eau, par le vent ou volontairement abandonnés dans la nature, une partie de ces déchets rejoint les milieux aquatiques et parcourt le bassin versant avec l’écoulement des eaux.
Ces déchets contribuent à la pollution de l’eau. À mesure qu’ils sont dégradés par les éléments (le soleil, l’eau, le gel, le vent, etc.), ils se fragmentent et donnent naissance à des particules de petite taille. Dans le même temps, certaines des substances qui les composent - et qui peuvent être des micropolluants - sont dissoutes par l’eau.
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Ordures, Moyvillers, Oise
© Office français de la biodiversité
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Macro-déchets sur une plage, Golfe normand-breton
© Karine Dedieu, Office français de la biodiversité
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Déchets plastiques contaminant un herbier de posidonies (Posidonia oceanica) et algues (Dictyota sp.)
© Julie Castera / Office français de la biodiversité
À terme, les déchets et leurs résidus de décomposition rejoignent les eaux côtières, puis le large, et sont alors qualifiés de « déchets marins ». Les courants les emportent au large et les concentrent progressivement dans des zones d’accumulation au milieu des océans, souvent qualifiés de « continents de plastique ». Pour autant, il ne faut pas oublier que les déchets marins proviennent en majorité des bassins versants, à hauteur de 80% environ (d’après Surfrider).
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Les micro-organismes pathogènes
Les rejets d’eau usées et les effluents d’élevages ou de certaines industries contiennent des germes microbiologiques d’origine fécale, qui peuvent être responsables de maladies graves s’ils sont ingérés. Les traitements d’épuration - assainissement collectif comme non collectif - ont pour rôle de détruire suffisamment de ces germes pour que le rejet soit inoffensif une fois dilué dans le milieu.
En l’absence de système de traitement, ou lorsque ceux-ci dysfonctionnent, la quantité d’organismes pathogènes rejetée dans l’eau peut devenir suffisante pour présenter un risque sanitaire en cas de baignade ou de consommation d’organismes comme les moules et les huîtres (en savoir plus sur les contaminations microbiologiques).
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D’autres types de rejets polluants
Certains rejets constituent une pollution du milieu sans qu’ils ne contiennent de substance polluante, mais parce qu’ils modifient les caractéristiques physico-chimiques de l’eau : les rejets d’eau très chaude par exemple (en savoir plus sur l’altération de la physico-chimie).
Les accidents comme les marées noires provoquent l’introduction dans les milieux de quantités importantes d’hydrocarbures de type lourd (pétrole brut et autres types de fioul). Leur arrivée massive sur les côtes provoque des mortalités chez de nombreux organismes (en savoir plus sur les mortalités de la faune et de la flore).
Les sources d’hydrocarbures dans les milieux ne se limitent pas aux accidents de transport de pétrole : la fuite d’un réservoir de véhicule, un accident de voiture, le dégazage illégal d’un pétrolier en mer, le déversement délibéré pour effectuer une vidange, etc. Ces carburants (hydrocarbures légers) provoquent moins de mortalités par engluement, mais ont des effets toxiques (en savoir plus sur la toxicité).
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Marée noire du Prestige sur les côtes de Galicie
© Stéphane M. Grueso / Wikimedia - CC BY-SA 3.0
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Pollution de la Deûle par des hydrocarbures, Lille
© Lamiot, Wikimedia - CC BY-SA 4.0
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Un bateau flotte parmi une mer d'huile issue de la marée noire dans le Golfe du Mexique
© Kris Krüg / Flickr - CC BY-NC-SA 2.0
Les 4 plus grandes pollutions accidentelles qui ont touchées les côtes françaises ces trente dernières années sont celles provoquées par :
- l'Amoco Cadiz, avec 227 000 tonnes d'hydrocarbures en 1978 ;
- l'Erika, avec 20 000 tonnes d'hydrocarbures en 1999 ;
- l'Ievoli Sun, avec 6 021 tonnes de produits chimiques (dont 3 998 tonnes de styrène) en 2000 ;
- le Prestige, avec 64 000 tonnes d'hydrocarbures en 2002.
Les radionucléides - ou éléments radioactifs - dangereux ne sont pas rejetés dans l’environnement par les centrales nucléaires en temps normal, mais les rares accidents donnent lieu à leur libération dans l’eau et l’atmosphère. Leur durée de vie parfois très longue rend la pollution par des radionucléides très durable, notamment lorsqu’ils contaminent les sédiments. Selon leur concentration, ils ont des effets toxiques à plus ou moins long terme sur les organismes (en savoir plus sur la toxicité).