Centrale hydroélectrique
© Pxhere - CC0
Les impacts de l’artificialisation sur l’eau et les milieux aquatiques
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Des destructions d’habitats et des ruptures de continuité écologique
Les altérations hydromorphologiques peuvent entraîner la modification ou la destruction directe de certains habitats naturels. Par exemple, le bétonnage du fond d’une rivière fait disparaître l’habitat qui s’est développé sur le lit, constitué de cailloux, de graviers ou de sédiments plus fins. La biodiversité qui occupe ces habitats est alors impactée : disparition de certaines espèces, plus faible diversité, etc.
La perte d’habitat peut aussi être indirecte, si les habitats en question existent toujours mais que les espèces ne sont plus en mesure d’y accéder. À l’échelle du bassin versant, les aménagements isolant les habitats les uns des autres se cumulent et mènent à une fragmentation du réseau hydrographique. Par exemple, dans le cas des poissons migrateurs vivant en mer mais se reproduisant sur des habitats situés dans les rivières, la succession d’ouvrages - comme les barrages sur les cours d’eau - les prive d’accès à certaines zones de reproduction. C’est ce que l’on appelle une rupture de continuité écologique (en savoir plus sur la continuité écologique).
Si ces impacts ne menacent pas directement la santé ou la sécurité des personnes, ils nuisent à certains usages des milieux aquatiques. La pêche est ainsi directement impactée par les diminutions de populations de poissons et les disparitions de certaines espèces.
Au 26 novembre 2020, en France, 104 459 obstacles à l'écoulement sont recensés, dont :
- 103 219 en métropole ;
- 113 en Guadeloupe ;
- 554 en Guyane ;
- 382 en Martinique ;
- 58 à Mayotte ;
- 133 à la Réunion.
Le référentiel des obstacles à l'écoulement (ROE) est accessible sur le site du Sandre et sur le site data.gouv.fr.
Consulter la carte, le référentiel et les données.
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Une accentuation du risque d’inondation
L’artificialisation des milieux et des sols modifie le parcours de l’eau dans le bassin versant. Les aménagements qui simplifient et homogénéisent les milieux ont pour conséquence de faciliter l’écoulement de l’eau : c’est par exemple le cas des cours d’eau dont le profil est rectifié ou des zones humides qui sont drainées. Cumulés sur l’ensemble du bassin, ces aménagements accélèrent le parcours de l’eau depuis l’amont vers l’aval. Les crues faisant suite à des pluies peuvent alors être plus rapides et plus fortes.
Ce phénomène est fortement accentué par l’imperméabilisation des sols à l’échelle du bassin versant. L’eau issue des précipitations ruisselle sur ces surfaces au lieu de s’infiltrer dans le sol, puis se concentre dans les réseaux de fossés et de canalisations, avant de finalement rejoindre les ruisseaux et les rivières.
L’artificialisation des milieux comme des sols favorise ainsi les risques d’inondation, susceptibles de causer des dommages aux personnes et aux biens (en savoir plus sur les inondations et leurs impacts). En particulier, la combinaison de milieux artificialisés et de grandes surfaces imperméables peut donner lieu à des crues éclairs en cas de fortes pluies dans un bassin versant, dévastatrices pour les infrastructures, les activités et les habitants. Les ouvrages de retenue d’eau tels que les barrages font peser une menace supplémentaire de submersion soudaines des zones aval en cas de rupture de l’ouvrage : ce type d’évènement n’a cependant eu lieu qu’à deux reprises en France (d’après Ministère en charge de l’écologie).
Maisons inondées Saint-Paul-de-Île-aux-Noix
© Pierre CB / Wikimedia - CC0
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Des sécheresses susceptibles d’être favorisées
Les aménagements qui accélèrent l’évacuation de l’eau, comme par exemple le drainage des sols, augmentent la vulnérabilité des sols et des milieux à la sécheresse (en savoir plus sur la sécheresse). L’imperméabilisation des sols peut aussi impacter la recharge des nappes souterraines. En favorisant le ruissellement des eaux de pluie aux dépens de leur infiltration, les surfaces imperméables court-circuitent le phénomène de recharge des eaux souterraines, favorisant la survenue d’étiages précoces. D’autres facteurs liés à l’artificialisation accentuent ce phénomène : par exemple, le caractère « chauffant » des surfaces goudronnées ou l’absence de végétation.
En cas de sécheresse, des solutions existent pour maintenir une alimentation en eau potable et ne pas menacer la sécurité des personnes. Toutefois, ces évènements ont de lourdes conséquences sur les usages qui dépendent directement du milieu - comme la pêche ou l’aquaculture - ou qui ont recours à des prélèvements d’eau. L’agriculture est par ailleurs fortement impactée par la sécheresse des sols (en savoir plus sur les impacts de la sécheresse).
L’observation de l'écoulement des cours d’eau est réalisé visuellement par les agents de l'Office français de la biodiversité dans le cadre du suivi usuel du dispositif d'observation des étiages (Onde).
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Une augmentation potentielle du phénomène d’érosion
L’accélération du parcours de l’eau qui résulte des altérations hydromorphologiques augmente la capacité des écoulements à emporter les sédiments (sables, graviers, galets), ce qui favorise le phénomène d’érosion (en savoir plus sur le risque érosion). Par exemple, les berges d’un cours d’eau peuvent devenir instables.
Dans certains cas, la création d’obstacles à l’écoulement (ponts, digues ou autres) déstabilise le fonctionnement du cours d’eau et conduit à un phénomène de creusement du lit. Sur le littoral, les aménagements réalisés peuvent modifier l’impact de la force des vagues ou les courants littoraux, avec pour résultat une accentuation du phénomène d’érosion côtière, parfois à distance de l’ouvrage en cause.
Ce risque peut concerner tous les aménagements, même ceux visant spécifiquement la protection du littoral contre l’érosion.
Érosion du sol après de fortes pluies
© Dagnygromer / Flickr - CC BY-NC-ND 2.0
La biodiversité peut être directement impactée, par exemple si l’érosion conduit à des destructions d’habitats - comme la déstructuration d’une berge de cours d’eau - ou à un rupture de continuité écologique - comme l’enfoncement du lit. La sécurité des personnes et des biens est susceptible d’être menacée, notamment en cas de glissement de terrain.
Enfin, de nombreux usages peuvent être affectés : perte de sols agricoles emportés par coulées boueuses, coupure de voies de communication à la suite d'un effondrement, interdiction d’accès de plages en raison de risques de chute de blocs, etc. (en savoir plus sur les impacts de l’érosion).
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Une dégradation de la qualité de l’eau
L’artificialisation altère le fonctionnement naturel des milieux. Les capacités d’autoépuration des milieux peuvent être amoindries, par exemple lorsque les échanges en le cours d’eau et la nappe d’accompagnement sont plus faibles (en savoir plus sur le fonctionnement naturel d’une rivière) ou que l’eau s’évacue plus rapidement d’une zone humide (en savoir plus sur le fonctionnement naturel des zones humides). En outre, les surfaces imperméables augmentent la part d’eau ruisselant lors des pluies.
Or, en ruisselant sur des surfaces imperméables plutôt que de s’infiltrer dans le sol, l’eau se charge en substances polluantes variées : substances métalliques des toitures, hydrocarbures contenus dans les mégots de cigarettes, résidus de combustion des carburants, etc. Plus l’eau ruisselle longtemps sur une surface imperméable, plus sa qualité se dégrade (en savoir plus sur la pollution de l’eau).
Pollution par du diesel sur la chaussée
© Camelia TWU / Flickr - CC BY-NC-ND 2.0
Cumulée sur l’ensemble du bassin versant, l’artificialisation des milieux et des sols conduit ainsi à diminuer l’épuration naturelle de l’eau et à augmenter les quantités de polluants emportés par l’eau, avec pour conséquence une moindre qualité à l’aval.
La biodiversité est directement impactée, soit par empoisonnement direct, soit par la toxicité à long terme. Les traitements de potabilisation de l’eau permettent d’éviter les risques pour la santé, mais leurs coûts augmentent lorsque la qualité de l’eau brute se détériore (en savoir plus sur l’eau potable). Les autres usages de l’eau et des milieux peuvent aussi être impactés, en particulier ceux qui dépendent directement de la qualité de l’eau, comme la pêche, la pisciculture ou la conchyliculture (en savoir plus sur les impacts de la pollution de l’eau).
La problématique spécifique des eaux pluviales en ville
En zone urbaine, l’augmentation des volumes ruisselants en cas de pluie pose un problème de gestion des eaux pluviales. Lorsque celles-ci sont collectées avec les eaux usées - c’est le cas des réseaux de collecte dits “unitaires” - elles augmentent fortement le volume d’eau à épurer dans les stations de traitement des eaux urbaines. Il arrive alors que la capacité d’épuration des stations soit dépassée, et qu’une partie des eaux de collecte soit rejetée directement dans les milieux, sans traitement, entraînant une pollution potentielle de l’eau.
L’artificialisation des milieux peut aussi avoir des conséquences sur la sécurité des personnes et des biens. Elle peut accentuer les risques naturels liés à l’eau : perte de stabilité des berges favorisant l’érosion et les glissements de terrain, moindre rétention de l’eau propice à la survenue d’une sécheresse du sol, etc.
Enfin, les usages et les activités peuvent aussi être impactés par certains aménagements. L’artificialisation des cours d’eau réduit par exemple le phénomène naturel d’autoépuration de l’eau, avec pour conséquence une moindre qualité de l’eau en aval, susceptible de générer des surcoûts de potabilisation par exemple.
Autre exemple, lorsque l’artificialisation provoque la réduction de l’abondance ou de la diversité de poissons, l’activité de pêche peut être directement impactée.